Avec RSF
Propriétaire du réseau social depuis le 27 octobre 2022, Elon Musk l’a transformé en sanctuaire de la désinformation. Pour Reporters sans frontières (RSF), Twitter, depuis devenu X, est l’incarnation de la menace que font peser les plateformes sur les démocraties.
Devenu officiellement propriétaire du réseau social X (anciennement Twitter) le 27 octobre 2022, Elon Musk est aujourd’hui le meilleur allié des désinformateurs du monde entier. Après une année ponctuée d’humiliations à l’égard des médias publics et d’actes de censure contre des journalistes, l’homme le plus riche du monde, selon Forbes, a également fait sauter les rares digues du réseau social contre la désinformation. Parmi les décisions les plus dangereuses pour l’accès à une information fiable, il a transformé la certification de compte, système de sécurité garantissant qu’un utilisateur est bien celui qu’il prétend être, en une offre commerciale permettant de bénéficier d’une visibilité accrue sur le réseau, sans garantie quant à l’authenticité du compte qui utilise cet outil.
Ce régime censitaire a fait la démonstration de toute sa toxicité à l’occasion de la guerre entre Israël et le Hamas. Selon une étude de la société NewsGuard, les comptes vérifiés de X ont diffusé 74 % des contenus de désinformation les plus viraux sur ces événements, et ont été vus 100 millions de fois.
“Elon Musk a achevé sa mue de défenseur de la liberté d’expression en champion de la désinformation. La plupart de ses décisions ont eu pour conséquence de renforcer les désinformateurs et d’affaiblir l’accès à l’information fiable sur sa plateforme. Entre les insultes qu’il adresse personnellement aux médias professionnels et la nouvelle direction anti-information que prend le réseau sous son impulsion, les journalistes et les médias n’y sont plus les bienvenus. Twitter n’était déjà pas un réseau sûr pour l’information, mais X est devenu la place forte de la désinformation.”
Vincent Berthier
Responsable du bureau technologies de RSF
La transformation de Twitter n’a pas été que technique, mais aussi politique. Sous l’impulsion d’Elon Musk, Twitter a quitté la liste des signataires du code de bonnes pratiques contre la désinformation de l’Union européenne, depuis devenu code de conduite du Digital Services Act (DSA). L’entreprise a également procédé à des licenciements en masse, notamment dans les équipes “Trust and Safety” en charge de la protection des utilisateurs sur la plateforme, dont la modération. Mécaniquement, ces décisions ont renforcé l’avantage concurrentiel dont bénéficie la désinformation sur les réseaux sociaux par rapport aux contenus d’intérêt général.
Pour RSF, X incarne le problème fondamental posé par les grandes plateformes qui obéissent à des intérêts privés qui confinent parfois aux caprices de divas. Rien n’empêche les grandes fortunes de faire main basse sur des services utilisés par des centaines de millions de personnes et d’y agir à leur gré. Il est temps que cela cesse et que les États-Unis, où se trouve le siège social de la plupart de ces grandes entreprises, s’inspirent du DSA pour enfin mettre de l’ordre dans les pratiques de cette industrie qui tire sa richesse du chaos informationnel qu’elle génère.