Avec AFP

Une enquête préliminaire a été ouverte en France pour des soupçons de bien mal acquis visant le président tchadien Mahamat Idriss Déby Itno. Une source proche du dossier a pu confirmer mardi 2 juillet à AFP ces investigations concernant les dépenses vestimentaires de la présidence de la République tchadienne.

Fin 2023, une enquête de Mediapart faisait état de dépenses s’élevant à plus de 900 000 euros pour l’achat de costumes, de chemises et de vêtements de luxe. Mediapart révélait « des versements opérés depuis une mystérieuse société baptisée MHK Full Business, enregistrée à Ndjamena et disposant d’un compte au sein de la Banque commerciale du Chari (BCC) ». 

L’enquête préliminaire a été ouverte dès le mois de janvier par le parquet national financier, pour détournement de fonds publics et recels. Le premier virement suspect aurait été réalisé par Mahamat Idriss Déby Itno début décembre 2021 et le second le 4 mai 2023. Au total, le président tchadien aurait déboursé plus de 915 000 euros pour acheter des vêtements de luxe chez un célèbre tailleur parisien.

Une enquête ouverte pour détournement de fonds publics et recel

La liste dressée par Mediapart donne un aperçu des folies vestimentaires qui auraient permis d’atteindre une telle somme, notamment 57 costumes d’une valeur unitaire allant de 9 000 à 13 000 euros, 100 chemises à 800 euros la pièce, ou encore neuf sahariennes à 7 500 euros chacune.

Une enquête pour détournement de fonds publics et recel a été ouverte en France au mois de janvier. Selon la presse française, les investigations pourraient être élargies au patrimoine immobilier détenu par la famille Déby et son entourage en France.

Dans sa récente autobiographie, Mahamat Idriss Déby était revenu sur cette affaire, expliquant avoir reçu des costumes de Abakar Manany, ex-conseiller chargé des affaires présidentielles et ministre d’État, tombé aujourd’hui en disgrâce. Des costumes qu’il a portés deux ou trois fois avant de les délaisser au profit d’habits traditionnels, qui ont sa préférence, ajoute Mahamat Idriss Déby, selon qui il s’agit d’ « un symbole de la manipulation en politique ». Dans le livre, le chef de l’État tchadien dénonce un « tapage médiatique absurde ». « Nous espérons que cette enquête établira la vérité et dissipera l’intention de nuire à la réputation du président de la République du Tchad », répète un de ses conseillers en communication, Armand Ndjegoltar.

Une « cabale » contre le président tchadien selon son entourage

Même si présidence tchadienne se veut plutôt discrète à ce stade et renvoie à la biographie du chef de l’État, la pilule passe mal dans son entourage immédiat, où l’on pointe « une cabale » contre Mahamat Idriss Deby. Certains responsables n’hésitent pas à pointer du doigt la France, alors que la société civile elle, demande que l’enquête aille jusqu’au bout. 

« C’est pour nous faire payer son voyage en Russie et la visite du chef de la diplomatie russe Sergueï Lavrov au Tchad dernièrement », estime l’une de nos sources. « C’est politique, on cherche à l’humilier, cela aura des conséquences sur nos relations », a renchéri un autre responsable, en se demandant si la justice française n’avait « rien de mieux à faire que de s’occuper des habits de notre chef de l’État ».

Du côté de la société civile, le président de « Tournons la page – Tchad » demande, lui, que cette enquête de la justice française aille jusqu’au bout. « Il faut qu’elle nous dise clairement si c’est Mahamat Deby qui est responsable ou si c’est son entourage », explique Jacques Saham Ngarassal.

Leave A Reply