Avec Alexis BILLEBAULT (Le Monde)
Le patron de la fédération nationale a refusé d’apposer sa signature sur le contrat du nouvel entraîneur des Lions indomptables, entré en fonction début avril.
La mer n’est pas loin, le soleil brille déjà et le thermomètre affiche près de 20 degrés en cette fin de matinée du dernier dimanche d’avril, mais Marc Brys ne profitera pas de cette belle journée crétoise. Pour le nouveau sélectionneur belge du Cameroun, qui s’est installé près de Héraklion avec sa femme, originaire de l’île grecque, et leur fils de 6 ans, après avoir quitté le club de Louvain en octobre 2023, l’heure n’est pas à la détente alors que se profile un match contre le Cap-Vert (3 juin), puis un autre contre l’Angola (10 juin), tous deux qualificatifs pour la Coupe du monde 2026.
Depuis sa nomination le 2 avril, le successeur de Rigobert Song, au cœur d’une controverse entre les autorités politiques et la Fédération camerounaise de football (Fecafoot), n’a pas chômé. Après la signature de son contrat de deux ans et demi au ministère des sports et la visite de plusieurs stades au Cameroun, Marc Brys a effectué une tournée européenne où il a multiplié les entretiens avec des internationaux et des joueurs binationaux éligibles pour porter le maillot des Lions indomptables.
L’Anversois a notamment été aperçu en Angleterre, en Allemagne et en France. « J’ai échangé avec André Onana, qui m’a beaucoup parlé de l’équipe, et de son attachement à son pays. » Il a également discuté avec Carlos Baleba, le jeune milieu de terrain de Brighton, qu’il espère avoir convaincu d’évoluer pour le Cameroun. En revanche, Hugo Ekitike, l’attaquant de l’Eintracht Francfort, imagine plutôt son avenir en équipe de France. « Nous devons respecter son choix », explique le nouveau sélectionneur, entré en fonction début avril malgré l’opposition de la Fecafoot.
« Caractère fort »
Près d’un mois après avoir été nommé par Narcisse Mouelle Kombi, le ministre des sports, sur instruction du chef de l’Etat Paul Biya, Marc Brys n’a toujours pas été reconnu par Samuel Eto’o. L’ancien buteur des Lions indomptables devenu dirigeant, estimant que la Fecafoot a été tenue hors du processus de recrutement du sélectionneur qui relève de ses prérogatives, a refusé de signer le contrat de ce dernier. Le 7 avril, le patron du foot camerounais avait même envisagé de nommer un autre sélectionneur dans les soixante-douze heures.
De son côté Marc Brys avait déclaré à l’occasion de son premier séjour à Yaoundé du 7 au 13 avril, être « prêt à travailler avec la fédération et son président, dans l’intérêt de la sélection et du pays. J’espère le voir, comme je l’ai déjà dit. Mais je ne suis pas du genre à courir après les gens, car je dois me concentrer sur l’équipe et les joueurs en vue des prochains matches ».
En Belgique, où il a entraîné de nombreux clubs pendant plus de dix-huit ans, le Flamand s’est taillé une solide réputation d’entraîneur intransigeant sur ses prérogatives sportives. « Je suis ouvert à la discussion, à l’écoute, positif, mais le vestiaire, c’est le lieu de l’entraîneur, de son staff technique et des joueurs, et dans lequel ni le ministère des sports ni la Fecafoot ne rentrent », dit-il. Une fermeté qui ne surprend pas l’ancien international belge Nordin Jbari, désormais consultant pour plusieurs médias et qui connaît Marc Brys. « Il ne tolère pas la moindre intrusion dans ses choix, qu’il s’agisse des joueurs ou du système de jeu. Brys est très sympathique, posé, mais il a un caractère fort et ne se laisse pas influencer. »
Découverte du continent
Le sélectionneur des Lions indomptables ne semble ainsi pas être affecté outre mesure par les rumeurs sur sa situation contractuelle. « J’ai lu et entendu que je n’avais pas signé de contrat. Mais j’en ai bien un ! », assure M. Brys, dont le salaire mensuel de 40 000 euros par mois – dont une partie sert à payer deux de ses adjoints – est pris en charge par l’Etat. Le Flamand avance également que ses relations avec le ministère des sports sont « excellentes. Tout est fait pour que nous puissions travailler dans des conditions professionnelles, j’ai toujours un interlocuteur pour répondre à mes questions et mes demandes ».
Un encadrement essentiel pour l’ancien entraîneur de Saint-Trond et de Louvain, qui découvre tout à la fois le continent africain et le métier de sélectionneur. « Je ne souhaitais plus entraîner en Belgique, je désirais vivre autre chose, dit-il. Je vais passer du temps au Cameroun pour échanger avec les entraîneurs locaux, suivre des matches de championnat et observer les sélections de jeunes, car l’avenir se prépare dès maintenant. »
L’agenda de Marc Brys, qui fera connaissance avec son groupe aux environs du 25 mai, lors du stage préparatoire aux deux matches de juin, s’annonce bien rempli jusqu’à la fin de l’année. Le Cameroun disputera en effet en septembre, octobre et novembre six rencontres comptant pour les qualifications pour la Coupe d’Afrique des nations (CAN) 2025, face à des adversaires encore inconnus.