Par Le courrier du cameroun
Eminent membre de la société civile, considéré comme l’un des syndicalistes, les plus représentatifs du Cameroun ; Jean Marc BIKOKO le coordinateur de Tournons la page, qu’on ne présente plus, nous a accordé une interview à bâtons rompus dans les locaux de la bourse du travail à Yaoundé. Au menu de cet entretien-vérité, figuraient en bonne place quelques sujets d’actualités tels que : La situation de la démocratie, Elecam, la présidentielle 2025, le code électoral, la candidature unique de l’opposition, et cetera et cetera.
L’invité de la Rédaction – Jean Marc BIKOKO, coordinateur Tournons la page Cameroun (TLP) Président de la centrale syndicale du secteur public (CSP)
Bonsoir Président Jean Marc Bikoko, de l’opportunité que vous nous offrez à travers cet entretien, alors que notre pays le Cameroun, traverse les moments les plus critiques de son histoire, sinon d’où vous est venu l’idée de lancer la coalition Tournons la page ?
Ce n’est pas mon idée, nous avons été associé à une dynamique internationale qui milite pour l’alternance démocratique en Afrique, avec pour slogan : pas de démocratie sans alternance, dont nous avons été partie prenante en 2014, dans le cadre du forum social mondial qui s’est tenu en Tunisie. Cette dynamique qui est constituée des organisations de la société civile européenne et africaine a été impulsée par des organisations militantes qui devaient mettre en place dans leurs pays respectifs des coalitions nationales. C’est donc dans cette logique qu’après échanges et concertations avec les organisations de la société civile membres de dynamique citoyenne (Réseau de suivi indépendant des politiques publiques et des stratégies de coopération), la coalition Tournons la page Cameroun a été mise en place, le 15 septembre 2015, jour de la célébration de la journée internationale de la démocratie.
Quels sont les objectifs visés par Tournons la page Cameroun ?
Le premier objectif de Tournons la page Cameroun est de promouvoir l’alternance démocratique en Afrique à travers un certain nombre de missions à savoir, entre autres : 1- contribuer à la consolidation de la mobilisation citoyenne pour la promotion de la démocratie en Afrique, 2- Mettre un terme à la confiscation du pouvoir par des réseaux et promouvoir le respect des règles et principes démocratiques en Afrique.
Quelques-uns pensent que l’alternance par les urnes est totalement impossible au Cameroun, en l’état actuel ?
La position de Tournons la page Cameroun et ses principaux membres comme la centrale syndicale du secteur public et dynamique citoyenne sont du même avis que ceux qui le pensent. Ceci parce que la conclusion à laquelle, on a fini par aboutir est que :”Elecam est une machine à fabrication des victoires du RDPC”, un instrument grossièrement mis en place par le système à qui on fait jouer des rôles contraires aux règles de transparence des élections.
Donc, pour nous en l’état actuel avec des règles qui encadrent, l’alternance par les urnes est totalement impossible. En revanche, il y a des préalables et mécanismes qui permettent d’espérer une alternance, ils portent sur la révision du code électoral donc les insuffisances ont été reconnues par tous les acteurs y compris Elecam en 2018; la recomposition d’Elecam par le truchement du principe du choix des représentants par les pairs et le remplacement du conseil constitutionnel par une véritable cour constitutionnelle conformément à la constitution.
En allant en rangs dispersés aux élections de 2025, l’opposition ne risque t-elle pas de reproduire les erreurs du passé ?
Il convient d’entrée de jeu de rappeler que le système en place, dès l’ouverture démocratique au début des années 1990 a pris des dispositions nécessaires pour que l’opposition ne soit que factice et ne puisse jouer qu’un rôle de faire-valoir, ce qui amène la coalition Tournons la page à la conclusion selon laquelle il n’existe pas d’opposition au Cameroun, ce qui en tient lieu ne donne pas la preuve de sa capacité à contrecarrer le pouvoir en place ceci au vu de sa composition et de la cacophonie idéologique qui y règne. Compte tenu de cette réalité, convoquer l’unité de l’opposition pour éviter d’aller aux élections en rangs dispersés n’est qu’un slogan politicien, parce que :1- On ne saurait mélanger les torchons et les serviettes et prétendre designer dans ce mélange un représentant de l’opposition. Donc, la polémique qui prévaut depuis un certain temps, à travers les débats publics ne relèvent que de la simple distraction.
Dites-nous quelques mots sur le choix de l’opposant Maurice Kamto par une coalition, comme candidat unique de l’opposition ?
Ce que nous pouvons en dire, c’est que les acteurs sont dans leur droit et on espère qu’ils disposent des moyens nécessaires pour assumer ce choix-là. Parce que il y a un dicton qui dit :” Qui veut aller loin, ménage sa monture”.
Que répondez-vous à ceux qui pensent que compte tenu du désintérêt des camerounais pour la politique, seule le choix d’une personnalité de la société civile et plus précisément du syndicalisme, sans étiquette politique comme vous, à la prochaine présidentielle, pourrait permettre de chasser Paul Biya du pouvoir en 2025?
Ce n’est pas une affaire d’hommes. Ce que je tiens à leur dire c’est que l’alternance dont nous parlons n’est pas une affaire de changement d’hommes, mais plutôt de changement de système. C’est la raison pour laquelle, nous convoquons les états généraux de la nation avant toute élection. À travers lesquels, on pourra redéfinir les règles du système qui doit gouverner notre pays. Bikoko est donc certes une figure emblématique, mais pour qu’il puisse jouer un rôle par rapport à la réponse aux préoccupations des camerounais, il faudra que le système ait changé.
Pensez-vous que Paul Biya sera candidat à l’élection présidentielle d’octobre 2025, tel que cela semble de plus en plus être le cas ?
En tout cas, lui-même a dit qu’il faut attendre la fin de mandat pour savoir, s’il continuera sa mission au sommet de l’État ou s’il rentre au village. Mais si le président Paul Biya aime le Cameroun et a de la considération pour les camerounais, il ne devrait plus se représenter comme candidat à la future présidentielle.
Propos recueillis par Yves Junior NGANGUE