Avec AFP
Les résultats sans appel du Super Tuesday mettent fin au faux suspense qui durait depuis quelques semaines aux États-Unis et Nikki Haley s’apprête à annoncer son retrait de la course à l’investiture, selon plusieurs médias américains. Si le “rematch” entre Joe Biden et Donald Trump est lancé pour de bon, mais sans enthousiasme de la population, la route des deux rivaux reste toutefois pavée d’embûches jusqu’à l’élection générale du mois de novembre.
La victoire est incontestable. En remportant 14 des 15 États en jeu, mardi 5 mars, lors du Super Tuesday aux États-Unis, Donald Trump a considérablement conforté son avance sur sa rivale Nikki Haley, qui n’a remporté que le Vermont mardi soir, et est assuré de remporter l’investiture du Parti républicain en vue de l’élection présidentielle. L’ancien président américain met ainsi fin à un faux suspense, alors que l’ancienne ambassadrice américaine à l’ONU a prévu d’annoncer mercredi la fin de sa campagne, selon le Wall Street Journal et CNN.
Trois ans après l’assaut du Capitole et son départ mouvementé de la Maison Blanche, Donald Trump a remporté un premier pari. Malgré ses déboires judiciaires et ses frasques, il s’est imposé, à 77 ans et en seulement deux mois, comme le grand gagnant des primaires républicaines, éliminant tour à tour des rivaux qui espéraient capitaliser sur l’image du “chaos” et le rejet qu’il était censé susciter à leurs yeux auprès des électeurs.
Ces derniers l’ont finalement porté à la victoire dans 24 primaires sur 27 depuis le début de la course à l’investiture. Et même si celle-ci peut en théorie s’étirer jusqu’à l’été et aux conventions nationales qui déterminent officiellement les candidats de chaque parti – chaque victoire permet d’obtenir des délégués, 1 215 sont requis pour la nomination –, l’équipe de Donald Trump, qui a déjà engrangé près de 1 000 délégués, prévoit une victoire le 19 mars au plus tard, après des scrutins en Géorgie et en Floride notamment.
L’ancien président va pouvoir jouer la revanche à laquelle il tenait tant face à Joe Biden. Il n’a d’ailleurs pas mentionné une seule fois Nikki Haley dans son discours de victoire mardi soir, consacrant toutes ses attaques contre l’actuel président en répétant que les États-Unis étaient devenus ces trois dernières années un “pays du tiers-monde”.
Trump face au défi de rassembler les électeurs républicains
Les primaires n’étant traditionnellement qu’une formalité pour un président sortant, Joe Biden a quant à lui logiquement remporté mardi tous les États en jeu pour le Parti démocrate, concédant une défaite anecdotique face à un inconnu dans les îles Samoa américaines, territoire du Pacifique.
Le match retour de l’élection de 2020 entre Joe Biden et Donald Trump aura donc bien lieu. “Les résultats de ce soir donnent un choix très simple aux Américains : continuerons-nous à avancer ou laisserons-nous Donald Trump nous plonger dans le chaos, la division et l’obscurité comme il l’avait fait lors de son premier mandat ?”, a interrogé Joe Biden mardi soir, accusant son adversaire d’être “focalisé sur sa propre revanche et sa vengeance, pas sur le peuple américain”.
Agiter les peurs ne devrait toutefois pas suffire, d’un côté comme de l’autre, pour convaincre ou enthousiasmer les électeurs. Ainsi, 64 % des Américains ne souhaitaient pas une nouvelle confrontation Biden-Trump, selon un sondage Reuters/Ipsos publié fin janvier 2024.
D’autant que la voie n’est pas totalement dégagée pour les deux candidats. Dans la poignée d’États disputés qui décideront en novembre du résultat de l’élection, Donald Trump aura besoin de récolter les suffrages des républicains modérés et des indépendants, au-delà de ses très fidèles partisans, en particulier les “Maga”.
“La question côté républicain va vraiment être de savoir si Donald Trump peut rassembler les électeurs : dans un sondage de sortie des urnes en Caroline du Nord, par exemple, 62 % des électeurs républicains ont déclaré qu’ils ne voteront jamais pour Donald Trump”, a souligné sur France 24 Jérôme Viala-Gaudefroy, professeur à Sciences Po Saint-Germain-en-Laye, spécialiste des États-Unis.
Le mouvement des “non-engagés”, possible épine dans le pied de Joe Biden
Donald Trump est par ailleurs empêtré dans de multiples affaires judiciaires. Visé par quatre inculpations pour un total de 91 chefs d’accusation, ses prochaines semaines seront rythmées par les procès. Il deviendra notamment, le 25 mars, le premier ancien président des États-Unis à comparaître devant une cour pénale dans l’affaire des paiements visant à étouffer sa relation supposée avec Stormy Daniels, une actrice de films pornographiques.
Quant à Joe Biden, qui devait déjà convaincre que ses 81 ans ne sont pas un obstacle à sa réélection, il doit également composer avec la guerre à Gaza. Mardi, une initiative visant à lui demander d’agir pour instaurer un cessez-le-feu immédiat dans le territoire palestinien a de nouveau affecté son score dans un État. Après le Michigan la semaine passée, dans le Minnesota, plus de 40 000 personnes ont glissé un bulletin blanc. Des militants ont appelé les électeurs à manifester ainsi leur mécontentement afin d’exhorter le gouvernement Biden à cesser de soutenir Israël.
Le Minnesota, l’un des États avec la plus grande part de population musulmane du pays, a ainsi voté à environ 20 % blanc, selon des résultats partiels diffusés dans la nuit de mardi à mercredi – une “victoire” pour ce mouvement, selon la responsable de l’association “Uncommitted Minnesota” (“Non-engagés du Minnesota”), Asma Nizami. Et un problème pour Joe Biden qui pourrait faire tache d’huile d’ici novembre.