Avec Wilfried EKANGA

Le Cameroun est un pays extrêmement sous-développé (j’insiste sur « extrêmement »), et ce sur tous les plans. Et ceci n’est pas le résultat d’une malédiction ou d’un coup du sort ; au contraire, les raisons de ce sous-développement extrême sont connues. Il en existe deux (02) en particulier : la première étant le fanatisme aveugle (souvent couplé aux affinités de village), qui pousse les Camerounais à continuer d’aduler des dirigeants au bilan médiocre, malgré l’évidence du fait qu’ils les conduisent droit vers l’abîme. La deuxième raison, encore plus déroutante, est l’extrême distraction de ceux qui vous reprochent précisément de… faire de la distraction.

De façon concrète, cela signifie que lorsque vous évoquez les sujets de l’heure tels que le recul des libertés publiques, la gabegie financière du gouvernement ou encore l’incapacité du régime de Yaoundé à résolver l’équation de la crise anglophone (et ce malgré les multiples solutions proposées par nous depuis 2016), le nombre de réactions à vos analyses se trouve étonnamment limité. Le ratio de commentaires s’avère en effet plutôt faible, comme si plus personne ne savait lire, ou que vous aviez écrit en grec ancien et que nul ne comprenait la langue.

Plus drôle encore, je me souviens que lors de la « CAN sucrée » en 2022, toutes nos tentatives de parler d’autre chose que de football étaient taxées d’ « antipatriotisme » par la même cohorte d’individus. Même lorsque la mauvaise gestion des flux à l’entrée du stade d’Olémbé avait coûté la vie à huit (08) jeunes innocents, les Camerounais nous ont fait savoir que « Ce n’est pas le moment ; on verra ça après la fin de la CAN ; pour l’instant, il faut rester focus sur le sport ». Nous fûmes en outre copieusement accusés de vouloir « tout ramener à la politique » et d’être des « déstabilisateurs notoires ».

VIRAGE À 360°

Mais chose curieuse, maintenant que nous avons décidé de suivre ces consignes à la lettre et de rester « focus sur le sport » pendant la CAN, maintenant que nous avons entrepris d’évoquer ce qui à nos yeux a conduit au fiasco des Lions Indomptables et qui devrait par conséquent être changé pour que nous ayons de meilleurs résultats, les mêmes nous exigent soudain de parler de la vie chère, du prix du carburant, du prix du piment, du prix du plantain, du prix du concombre… et même des élections de 2025 ! Le football est tout à coup devenu « la distraction », alors qu’il y a deux ans, la distraction c’était justement le fait de ne pas parler de football en période de football !

Qui plus est, les réseaux sociaux sont subitement reconnus comme un endroit où l’on peut changer les choses, alors que les mêmes n’ont eu de cesse de nous dire : « C’est sur Facebook que vous pensez que vous allez développer le Cameroun ? »

Quelqu’un a dit Sorcellerie ?

Et encore, ce n’est même pas le plus grave. Le plus intrigant en effet, c’est que la quasi-totalité (près de 95%) de ceux qui vous demandent de parler du coût de la vie ou des enjeux électoraux à venir… n’en parlent jamais eux-mêmes ! Sur ce fameux réseau Facebook, je me suis amusé à parcourir des dizaines de profils de ceux qui m’invitent à « ne plus céder à la distraction » et à « évoquer les maux sociaux », et quelle ne fut pas ma surprise de découvrir qu’eux-mêmes n’ont jamais écrit la moindre virgule sur le sujet ! Leurs pages sont aussi vierges que la mère de Jésus. En revanche (et de manière totalement incompréhensible), ils sont en mesure de passer 24 heures d’affilée sur d’autres pages (dont celle-ci) à parler de football !

Vu que eux ne sont a priori pas distraits, la logique voudrait en principe qu’ils prêchent par l’exemple et qu’ils évitent toute publication parlant de football, pour se concentrer sur la pénurie de carburant ou sur le massacre de Nkambe survenu hier, 11 février. Mais il n’en est rien.

C’est exactement comme si une fille de MiniFerme vous ordonnait de pratiquer l’abstinence ; vous auriez envie de l’interner tout de suite. Car il est évident qu’elle souffre de graves soucis mentaux !

EN CONCLUSION :

Tout ceci n’a donc qu’une déduction logique : nous faisons ici face à une horde de fanatiques aux frontières de l’envoûtement. Des automates dépourvus de toute raison. Des possédés ayant été dépossédés de toute lucidité. Des fidèles pastoraux qui, plutôt que de s’avouer clairement que leur fanatisme et/ou leurs affinités villageoises leur provoquent de vives douleurs à la poitrine quand on évoque (fort à raison) l’incompétence flagrante de leurs chères idoles, choisissent le raccourci insolite de nous exiger d’arrêter de parler de football. Par ailleurs, en fonction du Level de possession, les éléments de langage appris par cœur tels que « aigris » ; « jaloux » et « haineux » ne sont jamais bien loin. « Vous les reconnaîtrez à leur fruit », comme dirait l’autre.

Voilà donc pourquoi la Crevettonie, votre chère patrie (et chère chérie), est extrêmement sous-développée ; un pays où l’idolâtrie prend le pas sur la chose publique et l’éthique ne connaîtra jamais le développement. C’est par le même ensorcellement que vous scandez toujours « Ayop ! » après 42 ans sans électricité ni autoroutes ; que vous criez toujours « Amen » après le fiasco en Côte d’Ivoire, que les assassins parmi vous portent toujours le titre de « Zomloa » ou que des prédateurs sexuels se font appeler « Papa » Bopda. Votre amour pour la médiocrité éternelle est totalement assumé, et par conséquent, le fond du trou restera encore longtemps le quotidien du pays des Crevettes. Une simple histoire de logique.

EKANGA EKANGA CLAUDE WILFRIED

( Prenons soin de nos malades )

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