Par Vincent-Sosthène FOUDA universitaire, correspondance
L’éthnofacisme naît de ce qu’il nomme, empruntant le concept d’« appareil idéologique d’État » au philosophe marxiste Louis Althusser, » l’appareil idéologique d’État » ethno-théologico-négationniste de l’acceptation de l’autre comme partie intégrante de la composition de la Nation. Sous cette expression se cache un ensemble de pensées et lobbies et d’actions de propagande lancés au début des années 1970 par des prélats, capitaines d’industries dans notre pays pour exclure les 255 autres ethnies qui composent le Cameroun et surtout pour se replier sur elle-même dans un mouvement expansionniste.
Comme toute herméneutique, Hubert Mono Ndjana procède de manière exégétique à partir d’un certain nombre d’ouvrages politiques dont les auteurs sont tous originaires de l’Ouest et qu’il décrit comme » des intellectuels organiques de l’ethnie. »
Ainsi, le 11 mars 1987, au cours d’une table ronde à l’Université de Yaoundé sur « La littérature politique au Cameroun » a ouvert à l’analyse critique le rapport que les uns et les autres ont avec le « Nous-Commun ».
Y-a-t-il aujourd’hui, 36 après cette lecture un problème de « Fascisme qui menace l’État », avec une « technique de mobilisation et finalement tactique pour la conquête du pouvoir ». Y-a-t-il au Cameroun un « regroupement autour d’une ethnie pour conquérir le pouvoir », parlons des pouvoirs car il n’y a pas qu’un pouvoir. Est-ce inquiétant de se poser ces questions ? Voilà des formules bien Raison et Pensée.
Si Raison et Pensée doivent gouverner notre rapport au monde, aux pouvoirs, à Autrui, alors cette conférence de Mono Ndjana n’est pas un monofacisme mais une ouverture pour déterminer les conditions de possibilité de l’être-ensemble, ces conditions n’ayant peut-être plus rien d’évident pour le penseur.! Le Professeur Romain Romain Mbele en mettant le texte originel à notre disposition, nous demande de le lire « tranquillement pour saisir les débats actuels qui se cristallisent sur la personne de Mono Ndjana. »
Une des grandes caractéristiques de l’ethnofacisme est le refus de tout débat et sa capacité à individualiser la critique. L’ethnofacisme comme le totalitarisme arendtien, fait disparaître dans ses cercles d’expression, les différentes classes sociales pour les remplacer par une masse informe de personnes. Chez Arendt, le terme de masse renvoie à un ensemble de personnes qui n’ont pas d’intérêts proprement communs et qui sont plutôt indifférentes à la politique.
Les distinctions s’effacent donc entre les individus, ceux-ci ne sont plus ni reliés, ni séparés. «La principale caractéristique de l’homme de masse n’est pas la brutalité et l’arriération, mais l’isolement et le manque de rapports sociaux normaux.» C’est ce que nous pouvons constater avec ceux et celles qui marchent derrière le corbillard de Mono Ndjana lance à la main droite et arbre de paix à la main gauche, ironie de la chose, ils veulent en découdre avec un mort qu’ils n’ont ni lu ni analysé ni lu.
Pour conclure, pour qu’un gouvernement ethnofaciste prenne place au Cameroun, il doit mobiliser la masse des individus, dans une société où ils ne participent habituellement pas au pouvoir et où ils sont plutôt isolés entre eux. Puis il doit faire en sorte d’éliminer les liens à l’intérieur des groupes organisés. Ensuite, un chef assez habile, bon orateur, devra faire émerger en eux des sentiments d’indignation, de frustration, de colère envers l’ancien système, et montrer la nécessité d’un changement radical. C’est alors qu’un monde fictif, comme l’appelle Arendt, peut venir se superposer à la réalité et les règles, à l’intérieur de celui-ci, sont imposées et semblent relever d’une logique implacable. Nous y sommes.